Harmut Rosa, Aliénation et accélération, vers une théorie critique de la modernité tardive


Qu’est ce que l’accélération sociale ?

Trois catégories distinctes : accélération technique, accélération du changement social et accélération du rythme de vie.

Accélération technique -> transformation du régime spatio-temporel de la société, c’est à dire de la perception et de l’organisation de l’espace et du temps dans la vie sociale. Le temps de plus en plus conçu comme un élément de compression ou même d’annihilation de l’espace. L’espace semble se contracter virtuellement par la vitesse des transports et de la communication.
Donc perte de l’importance de l’espace : les activités et les développements ne sont plus localisés et les endroits réels (hôtels, banques, universités etc) tendent à devenir des non-lieux.

Accélération du changement social -> « compression du présent » (p. 22)
Ex dans la famille et le travail. Changement qui a accéléré pour passer d’un rythme intergénérationnel aux débuts de l’ère moderne à un rythme générationnel dans la modernité ‘classique’ (1850-1970), puis intragénérationnel dans la modernité tardive. Cycles de vie familiaux plus court, ainsi que dans les métiers. Globalement stabilité institutionnelle en déclin.

Accélération du rythme de vie -> « famine temporelle » des sociétés modernes. Temps percu comme matière consommable. Ce rapport au temps apparemment paradoxal en vue de l’accélération technique.
Accélération définie comme «  augmentation du nombre d’épisodes d’action ou d’expérience par unité de temps » p25 -> désir ou besoin ressenti de faire plus de choses en moins de temps.

2. Les forces motrice de l’accélération sociale


a) le moteur social : la compétition
marché capitaliste concurrentiel -> production, gain de temps -> meilleur rentabilité
mais compétition qui dépasse la sphère économique, présente dans tous les domaines (travail et perso) + certains outils technologique favorisant ce phénomène (FB)
« La logique sociale de la compétition est telle que les concurrents doivent investir une énergie accrue pour rester compétitifs, jusqu’au point où cet effort n’est plus un moyen de mener une vie autonome en fonction de buts autodéfinis, mais le seul but général de la vie, tant sociale qu’individuelle » p37

b) le moteur culturel : la promesse de l’éternité
équivalent fonctionnel à la promesse religieuse de vie éternelle
Selon logique culturelle dominante de la modernité occidentale, la richesse, la qualité d’une vie peut se mesurer en fonction de la somme et de la profondeur des expériences faites au cours de la vie (p38) -> selon cette idée « la vie bonne est la vie accomplie » (p.38)
mais options disponibles qui surpassent ce qui est réalisable au cours d’une vie
vivre deux fois plus vites pour doubler la somme des expériences vécues pendant la durée de notre vie
accélération comme stratégie pour effacer les différences entre le temps du monde et le temps de notre vie
accélération du rythme de vie comme une réponse au problème de la finitude et de la mort.
Impossible évidemment, recherche insatisfaisante et face à un paradoxe : les techniques memes qui nous ont permis de gagner du temps ont démultiplié le nombre d’options dans le monde. Course sans fin et de plus en plus frustrante.

c) le cycle de l’accélération
trois catégorie : accélération technique, accélération du changement social et accélération du rythme de vie en sont venu à s’emboiter dans un système qui s’anime tout seul, système autopropulsé qui n’a plus besoin de moteur extérieur.
Boucle auto-alimentée : l’accélération technique liée à l’emergence de nouvelle technologies apporte inévitablement des changements dans les pratiques sociales (ex avec internet ; pas seulement fait augmenter a rapidité des échanges et la virtualisation des processus économiques et productifs, mais aussi établi de nouvelles structures professionnelles, économiques et communicatives -> nouveau modes d’interractions sociales et nouvelles formes d’identité sociale).
Soit :
Accélération technique -> changement des structures et modèles sociaux (accélération du changement social) -> « compression du présent » -> accélération du rythme de vie -> nouvelles formes d’accélérations techniques nécessaires pour accélérer les processus de la vie productive et quotidienne -> etc etc etc
phénomène de la « pente glissante » propre au capitalisme, équilibre impossible, condamné à monter ou à descendre « car rester immobile est équivalent à tomber en arrière, comme l’ont noté Marx et Weber ». (p42)


3. Qu’est ce que la décélération sociale ?

a) les limites de vitesse naturelles
processus impossible à accélérer à moins de la modifier qualitativement: EX : vitesse de la perception et du traitement dans nos corps et cerveaux, temps nécessaire à la reproduction des ressources naturelles

b) les oasis de décélération
certaines niches territoriales sociales ou culturelles : groupes retirés ex Amish

c) la décélération comme conséquence dysfonctionnelle de l’accélération sociale
conséquence involontaire du processus d’accélération, dysfonctionnement ex : l’embouteillage, ou pathologique ex : la dépression

d) la décélération intentionnelle
1. décélération fonctionnelle (accélératoire)
décélération qui vise à préserver la capacité d’accélération, ex de retraites dans des monastères comme repos à la course dans le seul but d’une participation après coup plus efficace aux systèmes sociaux accélératoires
décéléré pour mieux accéléré ensuite, toujours logique d’efficacité
2. décélération idéologique (oppositionnelle)
peu existante mise à part certains mouvements sociaux antimodernistes. Mais souvent décélération fonctionnelle.
En fait accélération rendu possible par la stabilité de quelques institutions modernes centrales telles que la loi, la démocratie et le régime industriel du travail, c’est que dans ce cadre stable qu’a été possible l’accélération à long terme. Mais cette stabilité semble être sur le déclin -> bien plus que les radicaux antimodernistes, c’est le succès meme de l’accélération qui pourrait mettre en danger les préconditions pour la société de l’accélération. Ex de la crise économique actuelle (modernité tardive qui tend à se débarrasser des institutions et régulations permettant de garder une stabilité à long terme, logique du capitalisme financier orienté à court terme -> accélération des vitesses de rotation du capital)
-> en ce sens décélération éco et politique nécessaire au maintient de la société de l’accélération.

e) le revers de l’accélération sociale : l’inertie structurelle et culturelle
paradoxe entre ces phénomène d’accélération et de flexibilisation généralisés et le fait qu’aucun changement réel n’est plus possible, dû à un système refermé sur lui-même, forme d’ « immobilisation accélérée » (p51). Vitesse des événements et transformations semble n’être qu’un phénomène superficiel.


4. Pourquoi il y a accélération plutôt que décélération

Globalement pas de force opposée. Voir catégorie précédentes. Forces décélératoires sont secondaires par rapport aux forces dominantes de l’accélération.


5. Pourquoi est-ce important ? L’accélération et la transformation de notre « être au monde »

Importance, car société modernes non pas régulée par des règles normatives explicites mais par la « force normative silencieuse »
Forces de l’accélération exercent une « pression uniforme » sur les individus -> sorte de « totalitarisme de l’accélération »
Modification de notre rapport au monde, aux autres être humains et à la société, à l’espace et au temps, ainsi qu’à la nature et au monde des objets inanimés.
-> l’accélération transforme les formes de la subjectivité humaine
Le temps devient denrée rare, mais l’espace semble se contracter, perd son caractère vaste et résistant.
-> conséquences importantes sur les structures du monde social ; proximité et distance sociales et émotionnelles ne sont plus liées à la distance spatiale
compression du présent (des périodes de stabilité) concernant les associations sociales + énorme augmentation des contacts sociaux noués -> « être saturé » (Kenneth Gergen, The Saturated Self. Dilemmas of Identity in Contemporary Life, Basic Books, New York, 2000, p.61)

De plus, en ce qui concerne les formes de subjectivités modernes ; le monde social ne demeure plus stable meme à l’échelle d’une vie individuelle -> changement dans modèle d’identités.
Forme moderne classique de l’identité fondée sur un plan de vie individuel et une autonomie reposant sur des évaluations fortes orientant un parcours de vie, tend à être remplacé par de nouvelles formes « d’identités situationnelles » flexibles -> caractère temporaire des paramètres d’identité, plus de plan de vie mais « surf sur des vagues »

Forte augmentation de vitesse de production a changé le rapport entre les êtres humains et leur environnement matériel -> renouvellement permanent (« structures jetables ») quand dans le monde prémoderne les choses n’étaient modifiées ou remplacées que si nécessaires (cassés ou défectueuses). Aussi car choses deviennent obsolètes bien avant que leur temps physique soit compté.

Perte de toute certitude sur la direction de l’histoire, une fin de l’histoire (p62 63)

-> Globalement pathologie et souffrance sociale importante et croissante


II. L’accélération sociale et lesversions contemporaines de la Théorie critique


6. Conditions préalables à une théorie critique

Théorie critique : Marx, Horkheimer, Adorno et Marcuse, Benjamin et Erich Fromm, Habermas et Honneth
Identification des pathologies sociales selon les considérations normatives et donc selon le contexte historique et social
cependant la souffrance n’est pas toujours identique à l’opposition consciente -> théorie de la « fausse conscience »
Sujets humains toujours guidés dans leurs actions et décisions par une conception de « la vie bonne »
comparaison critique entre ces conceptions de la vie bonne et les pratiques et institutions sociales réelles


7. L’accélération et la critique des conditions de communication

Impossibilité, notamment dans le politique, d’instaurer un réel débat d’idée et réflexion autour d’arguments, et ce étant donné la vitesse dans laquelle est prise la communication. « En somme, il se pourrait bien que les mots, et même pire encore les arguments soient devenus trop lents pour la vitesse du monde de la modernité tardive. Les modèles capitalistes de distribution sont donc devenus plus ou moins inaccessibles et imperméables aux revendications de justice (…) » p 76-77


8. L’accélération et la critique des conditions de reconnaissances sociales

Vitesse comme norme sociale complètement « naturalisée » - les normes et structures temporelles semblent être juste « données », ne sont donc plus perçu comme construites socialement et politiquement négociables. Et distribue la reconnaissance et non reconnaissance : « les rapides triomphent et les lents restent en arrière » p79
Etant donné cette construction non apparente, « les perdants » ne se rendent généralement pas compte de l’injustice dans laquelle ils se trouvent. Car cette compétition liée à la vitesse est considérée comme légitime.
Effet cyclique : lutte pour reconnaissance sociale à travers la vitesse, qui elle meme fait tourner la roue de l’accélération.
Société prémoderne : reconnaissance défini par avance selon le statut social, la propriété et les privilèges (roi, duc, moine, etc)
Société moderne : reconnaissance à acquérir, pas de positions prédéfinis, statut et biens à acquérir
Mais dans société de la modernité tardive, statut acquéri ne suffit plus, faire preuve de toujours plus de performance pour rester en course, moins de stabilité, lutte plus centré sur la position mais sur la performance (autant dans des emplois qualifiés que non qualifiés, positions précaires). La reconnaissance ne se cumule plus elle est toujours remise en danger. -> épuisement dans une lutte quotidienne


9. L’accélération comme nouvelles forme de totalitarisme


forme de totalitarisme car :
a) exerce une pression sur les volontés et les actions des sujets
b) on ne peut pas lui échapper, affecte tous les sujets
c) omniprésent, son influence ne se limite pas à un domaine de la vie sociale
d) difficile voire presque impossible de le critiquer ou le combattre

-> omniprésent et invasif
peur constante de perdre le combat
mais coeur de la critique : ces diktats ne sont pas reconnus comme construits socialement, ce qui empêche la mise en question, la critique et la transgression, pas de débat politique sur ce sujet
« Le temps est encore vécu comme une donnée naturelle, brute, et les gens tendent à se blamer eux memes de mal gérer leur temps lorsqu’ils ont l’impression qu’il leur en manque. Le temps jusqu’à maintenant, est essentiellement au delà du domaine de la politique. » p86



III. Contours d’une théorie critique de l’accélération sociale


10. Trois variantes d’une critiques des conditions temporelles

Temps comme élément omniprésent du tissus social

(…)


11. La critique fonctionnaliste : les pathologies de la désynchronisation

désynchronisation entre l’accélération de la société et les cadres temporels de la nature environnante. Epuisement des ressources naturels (pétrole par ex) à une vitesse bien supérieure à celle de leur renouvellement.
d’autre part, corps et psychisme humain eux aussi surchargés par le tempo rapide de la société -> augmentation du nombre de depression et burn-out.
désynchronisation entre politique et l’évolution socio-économique (société davantage pluraliste et moins conventionnelle et stable -> formation de l’opinion plus longue et groupes sociaux plus hétérogènes puisque les conditions du milieu se modifient plus rapidement). La politique ne donne donc plus le rythme du changement social. Transformation du rôle de la politique de la modernité classique à la modernité tardive, passant d’un instrument de dynamisation sociale à un obstacle, une nuisance à l’accélération.
Mais dérèglement pas juste entre l’économie et les autres sphère mais au sein de l’économie même : vitesse en constante augmentation de ‘linvestissement et du capital en opposition au rythme plus lent de l’économie « réelle » (production et consommation réelles) -> crise financière de 2008
Désynchronisation aussi avec reproduction culturelle, soit le passage d’un savoir et de normes culturelles d’une génération à une autre, qui apporte une forme de stabilité et de continuité. Plus ou peu de stabilité intergénérationnelle, ce qui menace de bloquer la reproduction symbolique de la société. Plus, capacité créative de la société pour trouver des réponses innovatrices à des conditions changeantes demandent du temps libre, de l’oisiveté aujourd’hui indisponible.


12. La critique normative : l’idéologie revisitée. Démasquer les normes sociales cachées de la temporalité

Paradoxe entre excessive liberté sur le plan moral et éthique (individualisation, libéralisation, pluralisation comme processus normatifs) et grosse interdépendance mutuelle
Pourquoi ? Malgré sentiment de liberté individuelle, également dominé par une série d’exigences sociales excessives en constante augmentation.
Actions quotidiennes justifiées systématiquement par la rhétorique du devoir.
Besoin de régulation et coordination des sociétés modernes par la mise en place de normes temporelles, domination des horaires et délais imposés, pouvoir de l’urgence et de l’immédiateté par la logique de la gratification et de la réaction instantanée.
Effet ? Sujets culpabilisés


13. La critique éthique 1 : la promesse brisée de la modernité

« Projet de la modernité » « basé sur l’idée et la promesse de l’autonomie, au sens d’autodetermination éthique : la manière dont nous vivons notre vie en tant que sujet ne doit pas être prédéterminé par des pouvoirs politiques ou religieux sur lesquels nous n’avons aucune prise, ni par un roi ou par un Eglise, ni par un ordre social qui prédéfinirait notre place dans le monde - le monde de la famille, de la politique, du travail, de l’art, de la culture, de la religion et ainsi de suite. » p106-107
Idée d’autonomie qui ne peut être préservée que si les conditions de vie construites socialement peuvent être considérées comme résultant d’une autonomie démocratique. -> projet de la modernité nécessairement politique.
Projet qui implique aussi le contrôle des forces de la nature : « si la vie doit être modelée par l’autodétermination humaine, les restrictions « aveugles » imposées par la nature doivent être affrontées et surpassées à l’aide de la science moderne, de la technologie, de l’éducation et d’une économie puissante » p107. Ainsi promesse de modernité accompagnée du « désir d’abattre les restrictions imposées à une vie autodéterminée, la pauvreté et le manque, la maladie et l’infirmité, l’ignorance et toutes formes de conditions naturelles défavorables. » p107
La modernité n’a jamais tenu ses engagements : impossibilité de tenir une vie autodéterminés étant donné les conditions de travail hétéronomes, et ce autant pour les salariés que pour les directeurs et employeurs qui n’ont « jamais pu maîtriser les règles du jeu, ils ont seulement appris à jouer avec elles avec succès » p108
Néanmoins, le système moderne de capitalisme économique et de politique démocratique a réussi à maintenir le rêve en vie jusqu’à la fin du XXe siècle. Promesse d’une « existence pacifiée » (termes de Marcuse), crédible en ce qui concerne l’attente d’une croissance économique forte, du progrès technologique, du plein emploi, de la diminution des horaires de travail et de l’existence d’un Etat-providence en extension. « En effet, le capitalisme semblait être un système économique culturellement acceptable à la lumière de la seule conviction profonde qu’il finirait par devenir si productif et si fort que les êtres humains seraient enfin libres de poursuivre leurs projets de vie individuels, leurs rêves, leurs valeurs et leurs buts sans être menacés par les épées de Damoclès du manque, du déclin et de l’échec. L’accélération et la compétition pouvaient ainsi être des moyen d’atteindre l’autodétermination.» p109
Mais promesse qui n’est plus crédible dans « la société de l’accélération » moderne tardive où le pouvoir de l’accélération n’est plus perçu comme une force libératrice mais comme une pression asservissante.
Accélération sociale plus forte que le projet de la modernité, elle continue alors qu’elle se dresse maintenant contre la promesse de l’autonomie. Phénomène inverse -> l’accélération n’assure plus la poursuite des buts et désirs mais sont utilisés pour assouvir la machine de l’accélération : rester dans la course, maintenir la compétitivité.
Telle compétitivité pour rester dans la course que cela ne coordonne pas avec un « projet de vie » et une possibilité de suivre un désir individuel, l’autonomie promise par la modernité.
Pas d’autonomie politique non plus, complètement dépendante de l’économie, passant par des « adaptations nécessaires » pour que la société reste dans la course, elle aussi.
Sacrifice de toutes les énergies individuelles et politiques au bénéfice de la machine de l’accélération, sous le signe de la compétitivité.

-> hétéronomie et forme d’aliénation, faire, décider de faire, sans le vouloir réellement


14. La critique éthique 2 : l’aliénation revisitée - Pourquoi l’accélération sociale mène à l’Entfremdung


a) L’aliénation par rapport à l’espace
Aliénation dans la relation moi-monde
l’espace et le temps sont « désencastrés » rendant possible cette aliénation
besoin d’un temps d’appropriation pour qu’un espace devienne familier, ce qui demande du temps
l’accélération créée une plus grande mobilité et donc plus grand désengagement de l’espace physique

b) L’aliénation par rapport aux choses
choses avec lesquelles nous vivons et travaillons participent à notre identité (-> Habermas)
mais relation au monde des choses qui varie en fonction de la vitesse des échanges, pas la meme individualisation/appropriation d’un objet que l’on garde, répare, jusqu’à épuisement que celui que nous remplaçons rapidement. Les choses sur la durée deviennent partie intégrante de l’expérience quotidienne vécue, « le moi s’étend vers le monde des choses, et les choses à leur tour deviennent des habitants du moi » p118
mais société d’accélération ne favorise pas la maintenance et l’entretien, réparer les choses devient plus cher que de les produire.
+ produits deviennent de plus en plus techniquement complexes, impossibilité de réparer nous meme
+ comme vitesse du changement social augmente : consommation morale surpasse commotion physique des choses (remplacement avant obsolète)
Distance se creuse avec les objets
aussi par le fait que nous ne prenons pas le temps de comprendre comment toutes ces choses fonctionnent complètement, étant donné leur complexité technique, complètement dépassés par ces choses « intelligentes »

c) L’aliénation par rapport à nos actions
Surcharge d’informations, qui fait que nous ne trouvons jamais réellement le temps de nous informer au sujet des choses qui nous concerne (Manuel d’utilisation, Contrats, « conditions générales » etc) -> sentiment d’aliénation
Mais aussi pour des choses majeures, des grandes décisions par exemples (choix d’étude par exemple, tellement de possibilité, pas le temps de savoir réellement) -> créant forme de culpabilité
Forme de distraction et de diffusion de ce que nous « voulons vraiment faire », la liste des choses à faire s’allonge dans tous les domaines de la vie + rhétorique de l’obligation qui indique ce sentiment d’aliénation « je dois vraiment… » -> hétéronomie
+ Consommation irréalisée à travers le shopping (plutôt que de prendre le temps de s’approprier les chose, de les comprendre et de les connaitre, nous en achetons d’autres, passage d’une chose à une autre rapidement) lié aussi à la gratification immédiate

d) L’aliénation par rapport au temps
« Paradoxe subjectif du temps » : le temps de l’expérience et le temps du souvenir ont des qualités inverses (faire quelque chose qui nous plait vraiment -> temps s’écoule très vite, mais la journée passée, après coup, elle semble avoir été très longue). Inverse pareil.
Ceci est normal, mais notre expérience du temps dans la modernité tardive change, le bref/long ou long/bref devient un motif bref/bref : l’accélération mène à l’enchainement d’actions déconnectées les unes des autres ne laissant pas l’espace à « l’après », juste passage d’une chose à une autre sans que celles ci n’ai le temps de s’ancrer, « tendance à l’effacement » p130
Tendance déjà identifiée par Walter Benjamin il y a un siècle -> « nous avons besoin de « souvenirs », de traces mémorielles extérieures, pour nous rappeler les épisodes simples d’expérience, alors que nous ne pourrions jamais oublier les vraies expériences au sens Erfahrungen » « Comme il l’avait prédit nous devenons de plus en plus riches d’épisodes d’expérience, mais de plus en plus pauvres en expérience vécues. Il en résulte que le temps semble « se consommer par les deux bouts : il passe vite et il disparait de la mémoire » p131 -> manque d’appropriation du temps -> mène à formes d’auto-aliénation.

e) L’aliénation par rapport à soi et aux autres
donc somme de tout ça -> de plus en plus désengagés, détachés des temps et des espaces de vies, des actions et des expériences, des choses avec lesquelles nous vivons et travaillons, cela est également valable pour le morne social.
Etre saturé par les connexions, état de saturation sociale -> il devient structurellement improbable d’établir une relation avec autrui.
Pas le temps pour être engagé personnellement
Désengagament et manque d’appropriation vis à vis de tout cela menant à la perte d’identité, au manque de sens, et donc à l’épuisement de l’etre et à la depression.





Conclusion

« Résonance » opposé de l’aliénation
une vie qu’on pourrait dire bonne serait peut être une vie riche en « expériences multidimensionnelles de résonance » dépendant de notre être au monde. Résonnance à l’opposé d’un rapport froid et silencieux au monde.